Le rationalisme qui vient - Bertrand Saint-Sernin
(…)
La mise en réseau des individus a un effet dont on ne prend que graduellement la mesure : l'inventivité scientifique change de forme.
On ne sait plus aussi distinctement comment naissent les idées neuves (d'où dans la plupart des articles scientifiques cosignés l'adoption d'une règle simple , spécifiant, par exemple, que les auteurs ont contribué à part égale aux recherches).
On exprime cet état de choses en disant que la recherche est devenue « collective ».
Or un groupe ne fonctionne pas comme un individu : les membres qui le composent échangent des idées, risquent des conjectures, débattent d'une argumentation, mais la circulation des idées échouerait si, cachés et opérants, des liens affectifs et la conscience de porter ensemble une responsabilité intellectuelle et morale ne donnaient pas au groupe sa cohésion.
Ce climat ne garde pas spontanément la tonalité désirée : il faut l'entretenir, le recréer, empêcher qu'il ne se défasse. C'est ce qui explique que si le nombre de scientifiques a augmenté le nombre de lieux d'excellence reste limité.(…)
Du côté des chercheurs la difficulté est grande, aucun des spécialistes ne maitrisant à lui seul l'écheveau tout entier, tous doivent, pour le désintriquer, combiner leurs savoirs.(…)
L'avancée ne résulte plus, comme dans la physique classique, du travail des générations successives , mais de dialogues simultanés entre spécialistes cherchant à traiter ensemble un problème qu'ils seraient incapables de résoudre s'ils restaient séparés. »
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