Le pinceau-livre

Le pinceau-livre

lectures

 


Son odeur après la pluie, Cédric Sapin-Defour

Cela fait bien longtemps que je n'ai pas commenté de livre, non pas que j'aie arrêté de lire, mais plutôt en état de paresse aggravée!

Et puis, il  y a eu ce livre, que je n'ai pas pu lâcher ou , pour dire vrai, que j'ai essayé de me distiller , de crainte de le terminer trop vite.

Ce roman, écrit par un amoureux de la montagne, parlera à tout ceux qui ont eu (et pleuré) un chien , ou en ont un, ou bien  encore envisagent d'en adopter un. Et pour ceux qui n'en ont pas , une envie de partager quelques années avec cet animal!

Ici, pas de grande théorie, mais des interrogations, pour respecter l'animal, pour savoir l'accompagner, pour être accompagné! Pas d'anthropomorphisme , ou si peu!

Cet amour partagé,  ce compagnonage sont vivifiants.

Bien sûr, on sait dès le départ qu'il y a aura l'ultime, la douleur, mais on devine qu'il faudra en passer parlà , puisque le temps des chiens n'est pas le nôtre.

Je vous conseille vivement de suivre Cédric et Ubac, et puis l'arrivée de Mathilde et d'autres chiens aussi.

Ce livre est une leçon de vie, d'amour infini,de savoir capturer l'instant, de vivre complètement au présent, comme le chien! Dans un style très littéraire, mais aussi chaleureux, Cédric Sapin-Defour nous livre un concentré de bonheur....

La préface de Jean-Paul Dubois est aussi une merveille.

 

Extraits : 

 

De l aimer me suffit. Car vois tu, je ne serai jamais s il m aime, jamais. Et aimer sans certitude de l être en retour...je me demande si l on ne tient pas ici la définition de l amour véritable

 

Ils aiment leur chien pour ce qu il est, un être vivant si proche et si détaché d eux mêmes et dont ils n attendent aucune flatterie que la célébration sans mise en scène d être ensemble.

 

Certaines minutes, je t'oublierai. Non, ce n'est pas l'oubli dont on parle, ce n'est pas en lui qu'on puise les forces de poursuivre, mais avec élégance et sans porte qui claque, tu t'absenteras de mes pensées. Quelques secondes lors des premières disparitions, avec pour béquilles le mouvement, la foule, la clarté ou des palabres. Puis des heures et des nuits même en ne rien faisant, même au silence. Et ces pensées, tu les regagneras avec douceur ou tu ressurgiras avec violence selon l'humeur des jours.

Mais il y aura de nets reculs. (...) ça arrivera dans un lieu si nouveau et si beau mais tellement sans toi, on ne sait pas. Puis elles se calmeront. Et elle s'espaceront. Au point de craindre leur disparition. Qui n'a jamais éprouvé l'angoisse que l'absence s'absente ?

 

 

« Ubac est là dans la cuisine, je pourrais croire qu’il m’attend. Le regardant discrètement par la fenêtre, je peine à croire que nous allons repartir ensemble. C’est lui, c’est sûr, les changelins ne sont pas de ce conte, je reconnais sa petite lice et cette façon de se déplacer, mi-gauche mi-féline, il chaloupe. Il est beau. Incroyablement beau. Je l’observe rencontrer la vie ; sa truffe plaquée au carrelage, il y a tous les dix pas une nouvelle galaxie à explorer : un pied de table, un sac de pommes, deux bûches de bois, une pantoufle, un autre pied, le même sac de pommes. Aucun trésor ne vaut plus que le suivant, l’idée est d’amonceler. A chaque bruit, il s’arrête et veut savoir, mesure-t-il tout ce qu’il y a à apprendre ? Il y a ces instants, si rares, souvent jamais, quand la vie vous dépose exactement où il le faut. Tout s’accorde, de la lumière aux sons des mots, des choses humaines aux perspectives. Comme si, malgré ce qui ressemblait jusqu’alors au hasard, aux dérives et à un statut de spectateur, tout avait été mis en place pour vous offrir cette scène et ce rôle qu’il s’agit d’endosser avec force. Mme Château m’a épargné le tableau des séparations, à la fratrie, à la mère, là dans la cuisine c’est comme si Ubac venait de nulle part. Peut-être ont-ils pleuré, peut-être a-t-il hurlé d’effroi ? C’est inhumain d’arracher un être à sa famille, les hommes entre eux, par la morale et la loi, sont condamnés pour cela. Les bêtes, elles, ne ressentent rien. C’est assez commode de jurer à leurs absences, on résout là bien de nos tourments. L’homme, après tout, fait ce qu’il veut de la sauvagerie ; quand ça l’arrange, il l’érige en modèle suprême, implacablement juste, d’autres fois, il se pince le nez face à tant d’une vie sans cœurs. »

 


02/11/2023
0 Poster un commentaire

Julie Gayet - Ensemble on est plus fortes

Je ne connaissais de Julie Gayet que son talent d'actrice. Je la trouvais très bonne interprète. Comme tous les Français, j'avais bien sûr lu dans la presse l'épisode du scooter de notre président. J'avais pensé que les médias en faisaient trop, comme d'habitude dès qu'ils ont un os à ronger. En fait, la vie privée des célébrités ne m'intéresse pas, surtout quand ils ne font rien pour s'exposer.

Julie Gayet aborde rapidement cet épisode dans son livre , mais c'est pour qu'on comprenne sa vie et sa démarche pour les droits des femmes.

 

Depuis longtemps, je pense que les femmes sont les grandes oubliées des sociétés patriarcales, gommées de l'Histoire, et le plus souvent en souffrance, que ce soit ailleurs dans le monde ou dans nos pays dits civilisés.

J'ai retrouvé dans son livre, ce que j'aime, ce féminisme qui n'est pas une haine des hommes mais juste ( et c'est déjà une ambition démesurée) une égalité.

Depuis lontemps aussi, je pense qu'il faut avertir les générations suivantes pour qu'elles ne considèrent pas que tout est acquis définitivement.

Je vous rappelle que nos droits ne sont pas si vieux et qu'ils sont parfois remis en question, même dans notre pays.

Dans ce livre, Julie Gayet parle de femmes qu'elles a côtoyées et d'un homme aussi, tous engagés pour défendre, soutenir, aider les femmes .

 

« On ne nait pas féministe, on le devient.

Pour cette raison, peut-être, je me suis demandé :

Et si c’était moi la femme bafouée, la femme battue, la gamine prostituée, jetée à la rue, la patiente qui souffre d’endométriose, ou la militante harcelée sur les réseaux ? Si c’était moi celle qu’on humilie, si c’était moi celle qu’on viole ou celle qu’on tue ?

Je n’ai rien subi de tout ça. Quel droit, alors, ai-je de parler ?

Et bien leurs droits à elles, justement.

Des droits qui continuent à être, tous les jours, foulés aux pieds.

Et parce qu’il faut encore le dire, le marteler, le hurler, et que je peux (veux) faire entendre ma voix, voici : un peu de moi, pour énormément d’elles. » J.G.

 

“ Ce livre pour moi c’était l’idée de mettre en lumière celles que j’ai rencontrées et qui ont fait grandir mon féminisme. Elles m’ont fait me confronter à la question de l’engagement féministe auprès des femmes avec nuance. Ces femmes, qui sont presque les Gisèle Halimi d’aujourd’hui, anonymes, ne sont pas suffisamment mises en lumière. On entend beaucoup de choses polarisantes, qui prennent toute la place médiatique, et parler avec nuance est devenu très compliqué. J’avais envie de les mettre en lumière et d’expliquer simplement, de comprendre et de raconter cet engagement au quotidien et les avancées qui ont lieu.” Julie Gayet

 

Si vous lisez ce livre, vous rencontrerez Lunise, Gwen, Georgette, Marie, Valence, Anne-Cécile et Denis. 

Ce livre, tout en délicatesse malgré les horreurs qui doivent être évoquées, vous fera grandir vous aussi.

 

Texte de la fondation des femmes avec des actrices qui s'engagent :

 

"On a subi. Quels que soient nos lieux de vie, nos métiers, nos origines, nous avons subi ou en avons été les témoins de sexisme ou de violences. 

On a enduré. Nous sommes passées outre. Nous avons essayé de faire comme si de rien n’était. Nous avons ravalé notre indignation pour avancer.

 On s’est tu. Souvent, nous n’avons rien dit. Par crainte. Par habitude. Pour oublier. Ou parce que nous espérions être l’exception plutôt que la règle.

 On a crié. Alors que certaines parlaient depuis longtemps sans être entendues, il y a quelques mois, des actrices ont percé le mur du silence.

 On a balancé. Elles ont ouvert la voie. A travers le monde, des millions de femmes leur ont fait écho. Grâce aux réseaux sociaux, elles ont mis en commun leur vécu

. On a dénoncé. De nombreuses femmes ont alors pour la première fois trouvé le courage de porter plainte.

 On a rassemblé. Parce que nous sommes convaincues que demain ne doit pas ressembler à hier ou à aujourd’hui.

 On a polémiqué. Nous vivons toutes le sexisme mais nous ne sommes pas toutes d’accord sur la façon d’y répondre. Parce que nous ne vivons pas les agressions de la même manière.

 Maintenant on agit. Nous sommes différentes mais avons une même envie d’agir. Nous voulons créer un présent plus doux pour celles qui souffrent aujourd’hui, et un avenir apaisé pour nos filles et nos fils. Les femmes victimes de violence méritent que les associations qui les accompagnent aient les moyens de le faire dignement.

Nous sommes inquiètes : mal accompagnées, les femmes sont vulnérables face à la justice. Il est temps d’agir.

Ensemble, soutenons celles et ceux qui œuvrent concrètement pour qu’aucune n’ait plus jamais à dire #MeToo. ."

 

 

 


17/03/2023
1 Poster un commentaire

J'irai tuer pour vous. Henri Loevenbruck

Cela fait bien longtemps que je n'ai pas publié un article à propos de mes lectures, et pourtant je suis une insatiable lectrice!

Ma fille aînée m'a recommandé ce livre : 828 pages dévorées en quelques jours, je n'arrivais pas à m'arrêter!

 

Voici le résumé, 4ème de couverture :

 

1985, Paris est frappé par des attentats comme le pays en a rarement connu.

Dans ce contexte, Marc Masson, un déserteur parti à l’aventure en Amérique du Sud, est soudain rattrapé par la France. Recruté par la DGSE, il est officiellement agent externe mais, officieusement, il va devenir assassin pour le compte de l’État.

Alors que tous les Services sont mobilisés sur le dossier libanais, les avancées les plus sensibles sont parfois entre les mains d’une seule personne… Jusqu’à quel point ces serviteurs, qui endossent seuls la face obscure de la raison d’État, sont-ils prêts à se dévouer ? Et jusqu’à quel point la République est-elle prête à les défendre ?

Des terrains d’opérations jusqu’à l’Élysée, des cellules terroristes jusqu’aux bureaux de la DGSE, Henri Loevenbruck raconte un moment de l’histoire de France – qui résonne particulièrement aujourd’hui – dans un roman d’une tension à couper le souffle. Pour écrire ce livre, il a conduit de longs entretiens avec «Marc Masson» et recueilli le récit de sa vie hors norme.

 

Mon impression :

 

A l'époque des faits, les otages du Liban, j'avais une trentaine d'années et je suivais l'actualité par le seul prisme des médias, il n'y avait pas internet. Des bribes d'information donc, toutes contrôlées par le pouvoir.

Cet homme, le héros du livre, agent extérieur de le DGSE a existé, il est à la fois volontaire pour mener cette vie particulière mais en même temps un peu à part et ce qui fait qu'on s'attache à lui.

Les dessous de la politique sont décryptés  et ce n'est pas très engageant, mais tellement réel et encore actuel!

 

Je vous invite à vous plonger dans ce livre passionnant, on en ressort plus informé et happé par cette histoire haletante.

Les citations ci-dessous vous en  donneront une idée !

 

Citations :

 

Très jeune, j'ai été déçu par le sens que le monde moderne a donné à la politique. Et par ceux qui la font. j'ai le sentiment que, comme va le monde, les gens s'intéressent trop à la politique et pas assez à la philosophie. La norme semble non plus d'avoir une pensée, mais un avis. Un avis politique. Au lieu de se forger chaque jour une philosophie de vie propre, on se sent obligé de choisir un camp, on devient un partisan, et, dès lors, on cesse de penser. on se met une étiquette, on en colle à autrui, et l'on ne juge plus qu'à travers elles. On fait de la politique un outil de dissension, de dispute, quand elle ne devrait servir que nos intérêts communs. Les gens qui font de la politique et ceux qui les élisent ne le font plus pour des raisons philosophiques, mais partisanes. ils ne pensent plus à l'humanité, mais à leur portefeuille.

 

 

En grandissant, au milieu des tumultes, la lecture ne m'a jamais quitté. J'ai toujours chéri les livres comme la plus grande richesse que les hommes puissent m'offrir. Je n'ai jamais possédé d'autre trésor que ma bibliothèque, jamais voulu m'entourer d 'autres décors que celui de ces milliers de vies, de pensées, de paysages à portée de main, offerts à chaque ligne à celui qui les lit, pour le prix d'une bouchée de seconde.

On dit que la lecture est un plaisir solitaire, mais celui qui ne lit pas est bien plus seul encore. Il lui manque le monde entier.

 

 

On se résigne. J'ai fini par apprendre à me contenter de ce que je suis. Un homme. Un petit homme. Bien loin des héros romantiques, des savants aventuriers et élégants auxquels les plus belles pages des plus grands auteurs me donnaient tant envie de ressembler. J'ai beau me battre pour y échapper - parce que, philosophiquement, la chose s'accorde mal avec ma haine du stéréotype - au fond, j'ai tout les travers du mâle, tous les poncifs de la plus navrante masculinité. J'aime les grosses motos qui font du bruit, les voitures qui vont vite, j'aime la bagarre, la boxe, les armes, la bière, j'ai une libido hypertrophiée, insatiable, j'aime les gros seins et les gros culs, je deviens fou quand on me fait une queue de poisson, je suis terriblement paternaliste, et rien ne me ferait plus honte que de pleurer en public. Je ne suis qu'un homme, en somme.

 

Il y en a qui disent que nous, les musulmans, on ne dénonce pas assez les attentats, qu'on devrait les condamner publiquement, et que si on dit rien, c'est qu'on les cautionne. Mais le reste du temps, on nous demande de nous intégrer, de faire comme tout le monde, de ne pas faire de bruits, de ne pas nous faire remarquer. Du coup, moi, je me sens complètement paumée, au milieu de tout ça. J'ai l'impression qu'on m'enlève le droit d'être simplement triste et terrifiée, comme tout le monde. Comme n'importe quelle Française. Dans la rue, j'ai l'impression qu'on me regarde de plus en plus de travers, comme si j'étais complice. Comme si je devais me justifier.

- Ca fait partie du plan des terroristes, Samia. Ils veulent faire monter le racisme et le sentiment anti-islam en Europe, pour que les musulmans s'y sentent de plus en plus rejetés, incompris, détestés, et que du coup, par réaction, ils se radicalisent, qu'ils rejoignent le camp des fondamentalistes. C'est vicieusement parfait, comme stratégie.

-Je sais. Et le pire, c'est que ça marche, Ollivier. L'autre jour, je suis sortie avec Fadia, et quand j'ai voulu nous commander à boire, elle m'a dit qu'elle ne prenait plus d'alcool. Et dans le métro, elle à mis un voile. Elle n'aurait jamais fait ça avant. Jamais. Et j'arrive pas à lui en vouloir, même si je trouve ça super triste. Elle a peur, en fait. Elle a besoin de se sentir appartenir à quelque chose d'autre, tellement elle a l'impression que la France la rejette. Je sais pas ce qu'on peut faire.

- C'est une histoire de fric, comme toujours. Derrière tout ça, il y a juste des pays qui, pour des raisons d'argent, essaient de mettre la main sur la communauté musulmane qui s'est installée en Europe, en espérant peser à travers elle dans les choix économique de nos pays.

- Et pourquoi les a-t-on laissés faire ?

- C'était une stratégie occidentale pendant la Guerre froide, Samia. Les Américains ont favorisé l'expansion d'un islam radical en espérant que cela empêcherait l'avancée du communisme et de l'influence soviétique dans le monde arabe. On a appelé ça la stratégie du "vert contre le rouge". Une immense connerie...

 

 


16/07/2020
0 Poster un commentaire

Trois semaines - Henri Granger

J'ai déjà évoqué le talent d'Henri Granger sur ce blog https://le-pinceau-livre.blog4ever.com/fable-contemporaine-henri-granger

Je viens de terminer la lecture de "trois semaaines".

Et je suis conquise une nouvelle fois, car Henri Granger sait garder son style, sa "patte" (Basile le renard?), tout en écrivant différemment. Et c'est la marque des vrais auteurs, de ceux qui ne ronronnent pas dans leur panier en resservant à chaque fois le même genre de plat. Non, chez Henri vous êtes toujours surpris, cueilli même, dirais-je!

Les personnages se croisent, leurs destins ne sont pas les fruits du hasard, mais le lecteur se laisse emporter par cette histoire originale, cette écriture à la fois poétique et mystérieuse où tout a une vie, une raison d'être, des sentiments, y compris pour les paysages, les objets, tout ce que nos yeux ne voient pas car bien souvent on observe sans voir.

Henri Granger, lui, voit tout, ressent tout, c'est un funambule de  l'écriture, un équilibriste des mots! Est-il un peu le héros du roman, souffre-t-il devant une page blanche? Il nous livre ici un roman passionnant!

 

Résumé :

Ces mots sont, pour la plupart d'entre nous, symboles de vacances. Ils représentent les voyages, les découvertes. La famille, le repos, les loisirs, la saison d'été. C'est le laps de temps que s'accorde Alfred, éditeur de son état, pour récupérer son écrivain. Du moins, le pense-t-il. Pour Isabelle, brillante avocate, un défi. Retrouver son mari et donner un nouvel élan à son couple. Une vie sereine, du moins, le croit-elle.

Gilles, l'auteur et l'époux, mesure cet espace qui sépare la fin d'automne au solstice d'hiver. En proie à lui-même, l'enjeu qu'il suscite l'importune. Troubles, manigances, trahisons et vérités. Trois semaines de luttes et d'incertitudes pour une délivrance. A moins que l'océan et les paysages merveilleux qui le composent ne dévoilent un tout autre chemin. Du moins, s'en fait-il une raison. Une bâtisse isolée.

Un village retiré du monde, des quotidiens chamboulés. Nul ne connaît son avenir et ses conséquences. Vingt et un jours, semblent si courts...

 

Extrait :

 

Dans ce lit, entouré de mur maculé de blanc, tout semble bien être. Paisible. Du blanc avec des reflets de blanc. Pur et léger. Cotonneux et suave.Un nuage sur lequel on voyage dans l'au-delà.Un envoûtement étrange. La lumière disparaît. Pourtant, cette inaccoutumée blancheur est toujours présente. Blanc comme le givre déposé sur le visage d'un enfant.Non. Sous les draps, il ne parviendra pas à troubler cette quiétude.Il est temps de sommeiller. fermer les yeux. Le corps de Sophie est une ode. Le rêver , c'est apaiser une souffrance. Le posséder, une excitation fragile. Le peindre avec des mots est une cicatrisation.

 

 

 

 

 


09/10/2018
0 Poster un commentaire

Les "dys", les "extras" et les autres....

 

Avant d’entreprendre la lecture du titre du livre de Cécile Bost « différence et souffrance de l’adulte surdoué », je me dis que ce sera un livre de plus qui parlera, comme de nombreux auteurs l’ont fait, du côté « petit génie » du surdoué.

Heureusement, dès l’introduction je suis rassurée et très intéressée par son propos :

 
Je n'aime pas les mots «surdon», «douance», «surdouance», «doué», «surdoué» ou même «HPI» (haut potentiel intellectuel). Porteurs de beaucoup d'idées fausses, ils me renvoient aussi aux plus sombres moments de l'Histoire, quand la catégorisation des groupes humains a fondé la décision d'en exploiter, voire d'en éliminer certains. J'utilise ces qualificatifs par pure commodité, car je n'ai pas, jusqu'à présent, réussi à en trouver de plus satisfaisants pour décrire une population au mode de fonctionnement particulier et avéré.
Le terme «surdoué» porte à confusion. La compréhension commune que l'on en a conduit à des malentendus et à de la souffrance. Le surdon est une réalité neurophysiologique.
Un surdoué, qui pense en permanence de façon différente, vivra très souvent l'expérience de l'isolement. Pas seulement un isolement physique ou affectif, mais plus sûrement une vraie solitude, un enfermement, parfois intolérable à endurer. Il est très rare que les surdoués s'ouvrent à qui que ce soit de leurs pensées et de leurs ressentis, même à leurs proches, et cette impossibilité à communiquer peut prendre un tour dramatique. Rompre l'isolement est fondamental
.
[…]
Un mot caractérise au plus près cette population particulière : «polymathe» - qui a des connaissances variées et approfondies. Mais, reconnaissez-le, ce mot ne fait pas vraiment rêver... Mon fils aîné m'a un jour proposé le terme d'«absurdoué». C'est le terme que j'aimerais bien garder en fin de compte, tant, effectivement, il y a quelque chose d'absurde dans le surdon, au-delà de la capacité effective à pouvoir s'intéresser en profondeur à différents sujets.
Un surdoué, ce n'est pas seulement une magnifique mécanique intellectuelle. C'est d'abord, et avant tout, un être d'une sensibilité physique et émotionnelle exacerbée, d'une hyperémotivité, au coeur d'un combat de tous les instants, qui absorbe une partie majeure de son énergie personnelle quotidienne.

Alors bien sûr, pour les autres, dès qu’on parle de surdon , c’est un peu comme un « coming out », c’est la différence qu’on dissimule parce que presque tout le monde confond surdon et élève brillant, futur polytechnicien. On se dit, « tiens, il (elle) a pris la grosse tête !

C’est aussi une errance qui peut durer des années parce qu’on se croit comme les autres, voire moins bien que les autres, seulement parce qu’on a une façon de penser différente.

Et c’est dommage, parce que, même en étant « dans le métier » on peut aliéner sa vie, gâcher celle de ses proches, ne pas savoir comment agir ni pour soi, ni pour eux.. 

Combien de dépressifs, presque réputés incurables, sont des « extranormés » qui s’ignorent ?

Grâce (enfin !) aux neurosciences , on peut maintenant prouver par l’imagerie cérébrale et par d’autres test que ce fout QI, qu’il y a surdon, que l’on naît ainsi et qu’on mourra hors norme !

 

Apprendre l'imperfection passe par le lâcher-prise, le plaisir de la curiosité et de l'expérimentation, sans pression du résultat. Aux adultes paralysés par une autocritique permanente et par le doute, voire par un réel sentiment d'infériorité, il est important de réapprendre le processus "essai/erreur" où ils se donnent le droit à l'erreur (un enjeu de taille, il ne faut pas s'y tromper !)

Une suggestion : identifiez les erreurs commises par des décideurs de tous ordres. Et vous verrez, je vous l'assure, qu'ils en commettent aussi. Ouvrez les journaux, écoutez la radio ou regardez la télévision et admirez combien de ces décideurs sont vivants, en bonne santé, et prêts à prendre de nouvelles décisions.
Visiblement, faire une erreur ne tue pas !

 

Dans le cadre professionnel, l'adulte surdoué est aux prises avec la nécessité de se conformer à sa hiérarchie. D'autant que ses supérieurs peuvent aller jusqu'à le considérer comme ingérable, voire dangereux pour l'organisation, quand ce n'est pas pour eux-mêmes. Pourtant l'adulte surdoué ne fait que regarder et poser des questions. Il ne cherche qu'à bien faire...

 

Le besoin d'isolement doit également être observé de près. Les témoignages recueillis pour ce livre ou sur mon blog l'ont exprimé : beaucoup de surdoués disent qu'(ils ont absolument besoin d'être en dyssynchronie avec le reste du groupe, surtout quand celui-ci est important. Le bombardement sensoriel est alors intense et l'adulte surdoué sature très vite. bruits, lumières, odeurs, mouvements, conversations - et même l'ambiance qui se dégage du groupe - sont autant d'informations captées massivement en un minimum de temps, qui épuisent. Le moyen le plus simple de se reposer est alors de "décrocher", de se replier sur soi, d'être là sans y être, en s'abîmant dans ses pensées pour se couper du monde extérieur.

Il ne faut pas confondre avoir un QI élevé (et pas forcément surdoué) et les caractéristiques décrites par Cécile Bost (oui même un dyslexique peut être surdoué !) :

 

  • Adulte perçu par son entourage soit « trop » ou « pas assez », pas dans la norme;

  • Personne ayant divers champs d’intérêts et souvent, beaucoup de connaissances sur chacun des ces champs;

  • On retrouve deux profils en fonction de la manière dont l’hypersensibilité est gérée:

    • D’un côté, trop impétueux, trop rapides, …

    • De l’autre côté, trop réservés, trop silencieux, …

  • La quasi-totalité des caractéristiques suivantes concerne chacun des profils:

    • « Trop » exigeants ou intransigeants;

    • « Trop » perfectionnistes et souvent incapable de déléguer;

    • Commencent « trop » de choses et ne finissant rien. Ils captent plus vite beaucoup de choses, ils sont curieux de tout, s’intéressent à tellement de choses qu’ils en apparaissent dispersés;

    • Passer du « coq à l’âne » dans une conversation;

    • Plus que d’autres, énergiques, infatigables – sur tous les fronts, certains sont épuisants à suivre dans leur rythme tant au travail que dans leur vie personnelle;

    • Ils peuvent abattre des sommes de travail, avec une qualité de production qui est en général performante voire au-dessus du lot. Ils sont souvent appelés en situation d’urgence car on sait qu’ils sont à peu près les seuls capables de faire face.

    • Très souvent brillants, ce sont des créatifs, ayant en permanence des idées originales, personnelles, novatrices;

    • D’un caractère ombrageux, ils sont difficiles, voire impossibles à gérer;

    • « Trop » indépendants. Ils sont capables de critiquer les décisions hiérarchiques, au point d’être parfois qualifiés de déviants dans une organisation classique un tant soit peu structurée;

    • Ils n’ont aucun sens pratique, ils sont « trop » rêveurs, conceptuels, « pas assez » terrain;

    • Ayant une pensée complexe, ils ont l’art de couper les cheveux en quatre;

    • Ayant un sens de l’humour particulier;

    • Ils sont très déterminés, voire entêtés;

    • Anxieux en permanence avec une étrange tendance dépressive;

    • Ayant en général peu d’amis, préfèrent les activités solitaires ou bien, papillonnent de tâches en tâches sans s’engager;

    • Individus toujours décalés, ils détonnent en fait partout où ils passent;

    • On ne comprend pas pourquoi ils ne réussissent pas mieux dans la vie, ils sont intelligents, voire brillants, en bonne santé;

    • Ils sont souvent amateurs de sports extrêmes;

    • C’est à croire qu’ils ont toujours besoin de faire plus, mieux, plus loin, plus fort… comme s’ils vivaient toujours en compétition;

    • Ce sont des amateurs de casse-têtes, d’énigmes, jeux de mots, des disciplines en -ogue (logos);

    • Ce sont en tout cas des adultes qui ne passent pas inaperçus.

 

Alors bien sûr, on n’est pas obligé de cocher toutes les cases ! Aucun « extranormé » ne ressemble à un autre, même si intuitivement (encore !) ils se reconnaissent ….

C’est pourquoi ces écoles, ces groupes, toutes ces normes encore pour des gens qui ne sont pas normés, me semblent peu utiles, sauf à savoir qu’on n’est pas seul !

Et puis il faut se méfier de cette mode où on trouve des génies partout, à la télé par exemple, ou bien à l’école quand bien des parents rêvent d’avoir engendré le génie du siècle…

Voyez-donc comme tout est compliqué !

Cécile Bost précise aussi combien il est difficile pour une femme de reconnaître sa douance, comment se croire plus rapide, plus efficace que certains collègues ? Il est remarquable de voir à quel point peu de spécialistes femmes sont conviées pour témoigner dans les médias !

Et l’émotion sera toujours présente, elle l’est d’ailleurs depuis  toujours, mais pour une femme, on met très vite cela sur le compte de ses hormones ! :

 

« …Le cerveau émotionnel de l’adulte est profondément marqué par les souvenirs des toutes premières années de la vie […] C’est ainsi que les adultes surdoués peuvent être à des années –lumière de leurs pairs en matière de connaissances, alors qu’ils semblent si peu matures quand il s’agit de la gestion émotionnelle… »

Vous aurez compris que je vous recommande la lecture de ce livre que vous soyez concernés ou non, c’est une richesse de pouvoir comprendre les autres… Et même en essayant de résumer et de citer, je n'ai pas pu faire le tour de la question et transcrire  l'intégralité de la pensée de l'auteur qui s'appuie rigoureusement sur des expériences , des constatations et des avancées scientifiques à ce sujet.

 

 

« Quel que soit son domaine de création, le véritable esprit créatif n’est rien d’autre que ça :   une créature humaine née anormalement, inhumainement sensible. Pour lui, un effleurement est un choc, un son est un bruit, une infortune est une tragédie, une joie devient extase, l’ami un amoureux, l’amoureux est un dieu, et l’erreur est la fin de tout. Ajoutez à cet organisme si cruellement délicat l’impérieuse nécessité de créer, créer, et encore créer – au point que sans la possibilité de créer de la musique, de la poésie, des livres, des édifices, ou n’importe quoi d’autre qui ait du sens, il n’a plus de raison d’être. Il doit créer, il doit se vider de sa créativité. Par on ne sait quelle étrange urgence intérieure, inconnue, il n’est pas vraiment vivant à moins qu’il ne soit en train de créer. »
Pearl Buck (1892 – 1973)

 

 


23/04/2018
0 Poster un commentaire